Après des années de mobilisations, le SNES a obtenu la transformation des contrats d’Auxiliaire de Vie Scolaire en un véritable métier. Mais la mise en oeuvre concrète de cette promesse électorale s’est traduite par des contrats en CDI alors que nous revendiquions un statut de fonctionnaire et par l’imposition d’une précarité sans issue aucune puisque le temps partiel imposé ne permettra jamais à ces salariés de vivre décemment. Les premiers contrats se signent actuellement.
Le SNES va continuer la mobilisation pour faire aboutir ses revendications et modifier radicalement la situation actuelle qui est inacceptable. Nous en appelons aux témoignages des AVS qui souhaitent nous contacter (les messages publiés seront anonymés). Ci dessous, un premier message que l’auteur a choisi d’intituler "journal d’un AVS"

Journal d’un AVS cdisé

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« Enfin, ça y est ! », l’espoir d’un vrai métier...
Voici la première pensée qui m’est venue à l’esprit lorsqu’en août dernier les médias annonçaient la cdisation des Auxiliaires de Vie Scolaire. Il ne me restait alors plus qu’un an à faire avant d’arriver au terme des 6 années de renouvellement de mon CDD. 6 années me direz-vous … et bien oui, l’État est le seul employeur qui peut de se permettre de renouveler des CDD pendant 6 ans sans obligation de CDI. Seulement voilà, les parents, les syndicats et les associations d’enfants en situation de handicap en ont eu assez de voir défiler chaque année des personnes qualifiées que l’on décidait de remiser au placard après 6 années de bons et loyaux services…

AVS pour une ULIS ( Unité Localisée d’Inclusion Scolaire), j’entamais donc ma rentrée 2013 dans de bonnes conditions, me disant qu’enfin, mon métier serait reconnu ! Il ne s’agirait plus seulement d’une fonction, mais d’un métier à part entière. J’allais enfin pouvoir faire des projets et je n’aurai plus à rougir de mon CDD devant mon banquier… Seulement je ne m’imaginais pas encore que ceci n’était qu’un écran de fumée et que la CDIsation promise cachait bien des failles…

Juin 2014 : difficile d’être informé...
Le mois de juin arrivant, je m’attendais à avoir des nouvelles concernant mon contrat : quotité d’heures, établissement d’affectation… Seulement voilà, personne ne savait me répondre ! Mon chef d’établissement comptait sur moi pour lui transmettre des informations et l’inspection académique me disait de patienter gentiment …
Après un acharnement sans faille auprès de l’inspection académique, les renseignements m’arrivaient au compte goutte… Et la désillusion fut totale… On nous proposait bien un CDI au terme de nos 6 ans mais à la même quotité horaire que lorsque nous étions en CDD ( 50 % pour moi, ce qui revient à 20h30 de travail habdomadaire). Lorsque j’ai fait part du souhait de nombre de mes collègues de travailler à temps plein, il m’a été répondu que cela n’était pas envisageable sur un établissement et irréalisable à effectuer sur deux établissements !
Pourtant, depuis mon entrée à ce poste je n’ai eu d’autres choix que de cumuler des emplois afin de vivre de façon décente. Il faut bien vous imaginer qu’avec moins de 600 euros par mois, il est difficile de joindre les deux bouts… Il faut donc trouver un second emploi qui accepte les contraintes du premier. Pas évident de réussir à combiner deux emplois du temps lorsque votre premier emploi ne vous laisse de libre que 3 jours et les fins d’après midi… Sans oublier que mon statut d’AVS me lie à une contrainte de taille : Il me faut effectuer 803 heures sur 39 semaines . Or les élèves ne vont à l’école que 36 semaines par an. Je suis donc redevable de 3 semaines à mon employeur et je me dois de les lui rendre en accompagnant par exemple les élèves sur des sorties scolaires, en assistant aux entretiens de suivi de scolarisation (ESS) ou encore en accompagnant les élèves de troisième lors du brevet et ce, même si cela tombe sur une journée où je ne suis pas censée travailler… Difficile donc de demander à mon second employeur plusieurs journées afin de satisfaire mon employeur principal ... Le seul travail envisageable en complément reste donc un emploi dans l’Education nationale ( aed, avs…) en CDD... ! Bref c’est la croix et la bannière ! Mais je l’aime mon travail, alors je tiens le coup…

Rentrée 2014 : Signature du CDI tant attendu !
L’inspecteur ASH (Adaptation Scolaire et Scolarisation des Elèves Handicapés) nous dévoile les nouveautés de la rentrée. Les AVS ont été rebaptisée AESH (Accompagnant des Elèves en Situation de Handicap). Un long discours nous présente le nouveau décret sur la cdisation puis une petite phrase vient faire descendre de leur petit nuage tout ceux et celles qui comme moi envisageaient ce CDI comme une vraie reconnaissance de notre métier : « N’espérez pas grand-chose de ce CDI. Votre salaire évoluera en fonction de votre indice, certes, mais jamais au point de pouvoir en vivre décemment. Vous n’accéderez pas à un temps plein. Pensez dès aujourd’hui à la Validation des Acquis et de l’Expérience afin de vous reconvertir ». Voilà, la douche froide…
Un métier ? Non, une plaisanterie !
Lorsqu’est abordée la quotité horaire, on nous annonce que les temps pleins correspondront à 41 heures par semaine. Comme aucun élève n’est scolarisé 41h par semaine, cela signifie automatiquement un temps partiel imposé, donc un salaire partiel... bref, la précarité. Quant au salaire, on nous parle d’indice, de points, de notes… mais aucun montant concret… Ça sera la surprise !

Aujourd’hui j’entame ma septième année auprès d’élèves en situation de handicap. Je me suis formée à mon métier sur le tas et grâce à l’équipe éducative avec laquelle j’ai collaboré toutes ces années. J’aime mon métier. J’aime voir que les élèves que j’ai suivi ont repris confiance en eux et en l’école. La plus grosse partie de mon satisfaction se lit dans leur yeux lorsqu’ils réussissent leurs examens, lorsqu’ils deviennent autonomes…
Pourtant aujourd’hui je vis sous le seuil de pauvreté, mais vous savez quoi ? Je suis cdisé...