Mme Le Recteur, ne rajoutez pas du mépris au mépris !

Lettre ouverte de la section académique du Snes-FSU, organisation majoritaire du second degré, à la rectrice de Lille.
Réponse aux propos rapportés par un article de la Voix du Nord publié le 21.06.2021 « Grand oral du bac : des élèves privés de jury renvoyés chez eux »

Madame le Recteur,

Alors que depuis des semaines, voire des mois, les représentants académiques du SNES FSU vous ont alertée à de multiples reprises sur les dysfonctionnements à venir concernant l’organisation des examens lors d’audiences intersyndicales, lors des deux derniers comités de suivi, en CTA et dans toutes les instances, vos déclarations dans la presse régionale hier faisant porter la responsabilité des nombreux problèmes rencontrés (que vous avez au passage minimisés) sur « les seules absences des professeurs » ont été vécues comme une insulte par une très grande majorité des enseignants de l’Académie.

Vos déclarations surviennent à l’issue de deux années scolaires très perturbées par la crise sanitaire et vous savez que dans ces circonstances, les personnels de l’éducation nationale n’ont pas ménagé leur peine pour faire au mieux, garder le lien pédagogique avec leurs élèves et lutter tant qu’il était possible contre le décrochage. Vous avez-vous-même souligné à plusieurs reprises cet engagement.
Depuis les premières épreuves de DNL, tout dysfonctionne et vous ne pouvez continuer à le nier.
Convocations erronées, envoyées très tardivement sans respect des règles habituelles (remise contre signature dans les établissements des enseignants plusieurs semaines avant le début des épreuves), convocations partielles, erreurs multiples dans la convocation des jurys, non-respect des textes régissant l’organisation de l’examen du grand oral (présence de « spécialiste »…) et ce ne sont pas quelques établissements qui sont concernés.

Ces dysfonctionnements dans les convocations n’ont pas seulement perturbé le bon déroulement des épreuves ; ils mettent en cause certains aspects réglementaires de l’examen puisque pour le Grand Oral, des jurys mal composés, ne comportant pas de spécialistes, ont interrogé des candidats. L’égalité de traitement qui est due aux élèves n’a pas été respectée, c’est une entorse grave aux règles et à l’esprit du baccalauréat. Ce n’est malheureusement pas la première année que nous assistons à de telles dérives puisqu’il y a deux ans, des jurys de délibération avaient reçu l’injonction de "fabriquer" des notes de philosophie sans aucun cadrage.

Depuis ce lundi 21 juin nous recueillons des dizaines de témoignages concernant des dizaines de centres d’examens dans tous les secteurs de l’académie tant dans le public que dans le privé.
Nous tenons tous ces témoignages à votre disposition : nous les avons rendus publics sur notre site et les médias nationaux s’en sont fait l’écho. Quel intérêt aurions-nous à falsifier la réalité alors que nous sommes attachés à cet examen national du baccalauréat et à des épreuves terminales. Alors que nous avons accompagné, préparé tant bien que mal nos élèves à ces nouvelles épreuves …
Madame le Recteur, vous qui n’avez jamais cessé de dire votre attachement au dialogue social, vous qui avez souhaité à de nombreuses reprises être en contact avec les réalités du terrain, vous nous devez de rétablir les faits et d’assumer toute la responsabilité des évènements qui sont venus perturber le passage de l’examen pour nos élèves.
Laisser entendre que le fiasco du Grand Oral serait liée aux absences des collègues que nous représentons et à leur légèreté est à la fois faux, injuste et insupportable. Cela contribue à jeter l’opprobre sur les professeurs, à encourager tous les poncifs sur la profession et à dresser injustement les familles contre les enseignants attachés à la réussite de leurs élèves !
Cela permet, bien sûr, d’épargner le Ministre de l’Éducation Nationale qui n’a pas hésité à mettre le système sous tension pour se prévaloir de l’application de sa réforme du baccalauréat, dont le Grand Oral est le totem.
Les professeurs ont besoin de vérité et de confiance, c’est l’intérêt du service public de l’Éducation Nationale !

Soyez assurée, Mme le Recteur, de notre profond attachement au service public d’Éducation Nationale.

Pour le SNES-FSU académie de Lille
Jean-François Carémel