Depuis de nombreuses années, la FSU revendique et mène des actions, avec les personnels de la Fonction publique, pour une revalorisation de nos métiers, de nos salaires et de nos carrières. Elle a pris toute sa place dans le cadre des discussions sur le projet de protocole "parcours professionnels, carrières et rémunération" qui se sont tenues avec le ministère de la Fonction publique. Dans ce cadre, la FSU n’a eu de cesse de porter ses revendications pour une revalorisation des salaires et des carrières profitable à tous les personnels et a, en particulier, porté l’exigence d’un dégel de la valeur du point d’indice. Le protocole était loin de répondre à l’ensemble des aspirations et revendications des personnels. La hauteur des mesures proposées par le gouvernement était éloignée de ce qu’il serait nécessaire pour rattraper les pertes de pouvoir d’achat. Toutefois, certaines mesures représentent des avancées importantes pour les personnels : le parcours de chaque grade à un rythme unique pour tous, le parcours d’une carrière normale sur 2 grades (ce qui est refusé à de nombreux agents actuellement), la reconstruction des grades des catégories B et C, l’ouverture de débouchés de carrière pour les corps de catégorie A, le transfert prime-points. Après analyse de l’ensemble du dossier, la FSU a décidé d’acter ces avancées en signant le protocole.
Le CTM de ce jour est chargé de porter un avis sur la déclinaison du projet de protocole aux corps des personnels d’enseignement et d’éducation du ministère de l’Éducation nationale. Cette transposition est un élément important pour ces personnels. En effet, il n’est plus besoin de grande démonstration pour faire admettre le déclassement spécifique de nos professions par rapport aux personnels de catégorie A de la Fonction publique ou aux salariés de même catégorie dans le privé. Du point de vue des salaires, les statistiques de notre administration sont éclairantes : le salaire net mensuel moyen d’un professeur est inférieur de 9,8 % à celui d’un cadre de la Fonction publique et de 32,7 % à celui d’un cadre du secteur privé. Quant aux comparaisons internationales, elles sont nettement défavorables à la France : au bout de 15 ans de carrière, le salaire des professeurs du premier comme du second degré est inférieur de 17 % à la moyenne de l’OCDE. Les mesures proposées ne rattraperont malheureusement pas ces retards, quoiqu’en dise la ministre. Conjuguées à la dégradation des conditions de travail, ce déclassement salarial a des conséquences graves sur le recrutement des personnels. Nombre de disciplines ne font pas le plein dans le second degré, y compris à l’agrégation alors que ce concours n’a jamais connu de désaffection, même lors des dernières crises de recrutement. La légère augmentation du nombre d’inscrits au CAPES peut-elle laisser espérer une timide amélioration cette année ? Permettez-nous d’en douter. Dans le premier degré, après le département de Seine-Saint-Denis, d’autres départements allongent la liste de ceux qui ont des difficultés pour recruter un nombre de PE suffisant. La crise du recrutement s’installe et cette revalorisation des carrières et des salaires arrive trop tard ; elle est insuffisante pour envisager une réelle recrudescence de l’attractivité de nos métiers. Toutefois, pour les personnels stagiaires et titulaires, cette revalorisation est très attendue. Elle est considérée comme une première étape dans un processus qui devrait intégrer un rattrapage des pertes subies ces 30 dernières années. La FSU considère que ces projets de décret contiennent des avancées qui répondent à une partie de ses revendications :
– le projet concerne l’ensemble des personnels d’enseignement et d’éducation ;
– les salaires et les carrières sont revalorisés au-delà du simple transfert « prime/points » prévu par la Fonction publique, permettant pour tous un gain indiciaire et/ou de déroulement de carrière ;
– l’avancement à rythme unique dans la classe normale est presque effectif : les deux moments de « réduction d’ancienneté » induisent une différenciation d’un an chacun. Cette disposition est un premier pas pour la FSU qui revendique un déroulement de carrière pour tous au rythme le plus favorable, sans obstacle de grade ;
– la reconstruction des carrières va permettre un raccourcissement des temps d’attente dans les échelons dès le 4e échelon de la classe normale ; les opérations de changement de grade seront cadrées nationalement avec la mise en place d’un barème national ;
– les indices terminaux pour les corps des professeurs certifiés et assimilés (PEPS, PE, CPE, Psy-ÉN) les ancreront nouvellement dans la catégorie A+, ceux des professeurs agrégés confortent leur assise dans le A+, ouvrant pour tous de nouvelles perspectives revendicatives et de progression de salaire et de carrière au sein de la classification des grilles indiciaires et du cadre général de la Fonction publique ;
– la valeur annuelle du point d’indice est dégelée pour la première fois depuis 2010 ;
– le principe d’un déroulement de carrière sur au moins deux grades est acté (même si c’est loin d’être le cas aujourd’hui chez les PE).
Le projet que vous nous présentez aujourd’hui est toutefois entaché d’insuffisances dont la FSU demande qu’elles soient revues et pour lesquelles nous attendons des évolutions. Des amendements seront présentés en ce sens sur plusieurs points : ? cette revalorisation (entre 6 et 62 points selon l’échelon) ne suffira pas à restaurer l’attractivité de nos professions, notamment en début de carrière : il convient de réduire à une année la durée du 3e échelon ; ? suite aux rendez ?vous de carrière, l’accélération en classe normale ne prend plus en compte, dans le 1er degré, l’ancienneté de service et ne reposera que sur l’avis de l’IEN, ce que nous dénonçons ;
– l’insuffisance de la revalorisation indiciaire de la fin de carrières des professeurs agrégés reste un problème ;
– l’étalement du calendrier jusqu’en 2020, de cette revalorisation demeure trop important ;
– la garantie d’une carrière sur deux grades doit être effective dès maintenant pour les personnels proches de la retraite, dans l’objectif que tous atteignent l’indice terminal de la hors ?classe avant de partir en retraite ;
– nous revendiquons d’avoir, à l’image de la plupart des autres corps de la Fonction publique de l’État, une déconnexion complète entre évaluation et déroulement de carrière. Quant à l’instauration d’une classe exceptionnelle, si ce débouché de carrière répond à l’allongement de la durée d’activité et donc de durée de carrière et permettra aux professeurs certifiés, d’EPS des écoles et CPE d’accéder à la HEA et aux professeurs agrégés d’accéder à la HEB, pour la FSU, le fait qu’elle ne soit réservée qu’à un nombre trop restreint de personnels, est inacceptable. La FSU dénonce les modalités définies et les volumes prévus pour y accéder. Ceux ?ci, calqués sur les pratiques managériales en vogue dans l’administration, sont inadaptées à la structure des corps enseignants et assimilés, sont de nature à diviser nos professions et, en l’état, ne permettront pas à tous d’atteindre ce grade avant leur départ à la retraite. Les fonctions reconnues engendreront inévitablement des inégalités entre les femmes et les hommes, entre les disciplines, entre les niveaux d’enseignement : secondaire / post bac…) ce que notre ministère reconnaît luimême. La FSU tient à rappeler sa revendication d’une carrière parcourue par tous les personnels à un rythme commun sans obstacle de grade. Dans cet objectif, nous rappelons que le barème national qui sera mis en place pour l’accès à la classe exceptionnelle devra permettre la rotation des promotions afin que le plus de collègues possible puissent bénéficier de ce débouché avant le départ en retraite.
La FSU dénonce la mise en extinction de la grille de rémunération des professeurs bi ?admissibles ainsi que le calendrier mis en place pour la revalorisation des carrières des instituteurs, des AE, des CE d’EPS et des PEGC. Concernant les premiers, il est incompréhensible que notre administration ne continue pas de reconnaître la double réussite à l’écrit d’un concours aussi exigeant que l’agrégation. De telles pratiques ont pourtant lieu dans d’autres corps de notre administration. Pour les seconds, le calendrier n’est pas acceptable. L’un des corps est de catégorie B, catégorie dont la revalorisation des grilles a débuté dans la Fonction publique depuis un an déjà et s’achèvera en janvier 2018. De plus, la plupart des personnels de tous ces corps sont proches de la retraite. Une revalorisation étalée jusqu’en 2019, déjà problématique pour les corps des professeurs certifiés, d’EPS, des écoles, des lycées professionnels, agrégés et CPE l’est encore plus pour les personnels de ces corps. La FSU souhaite un calendrier plus resserré. D’autre part, dans le cadre du projet de loi sur l’égalité réelle, une attention particulière doit être portée sur Mayotte afin que les dispositifs transitoires se traduisent par un alignement des traitements indiciaires et de déroulement de carrière entre la métropole et Mayotte. La FSU fait l’analyse depuis de nombreuses années que le dispositif actuel d’évaluation, dans le premier comme dans le second degré ne répond pas à l’objectif qu’il devrait poursuivre : celui de l’amélioration des pratiques professionnelles des personnels dans le but d’une amélioration du service public d’éducation. Pour la FSU, l’évaluation doit répondre à l’objectif de permettre aux personnels d’avoir du temps pour porter un regard réflexif sur leur métier. Par conséquence, elle doit être déconnectée de l’avancement de carrière. Pour cela, elle doit être conçue comme exclusivement formative et donc déboucher sur des conseils et des préconisations et non pas des injonctions. Force est de constater que l’évaluation actuelle ne répond pas à ces objectifs. Elle est aléatoire (certains personnels peuvent bénéficier d’une évaluation tous les 4 ?5 ans d’autres tous les 10 ans voire plus), infantilisante (certains personnels sont déconsidérés lors des évaluations, subissent des pressions méprisantes) et a des conséquences importantes sur la carrière dont nul ne comprend la raison. De plus, dans le second degré, elle engendre des inégalités importantes entre les professeurs des différentes disciplines. Le changement de la structure et de la progression de carrière et la déconnexion partielle de l’évaluation et de la carrière impliquent de revoir les finalités de l’évaluation. La FSU fait l’analyse que le nouveau système est plus égalitaire d’abord parce que chacun sera évalué au même moment de sa carrière ; ensuite parce que les attendus de l’évaluation seront connus ; ensuite aussi parce que les conséquences de cette évaluation sur la carrière seront réduites par rapport à la carrière actuelle ; enfin parce que l’action des évaluateurs sera davantage cadrée. Toutefois, ces nouvelles modalités d’évaluation ne sont pas exemptes de critiques et génèrent des inquiétudes chez les personnels. L’économie générale des items pourrait faire porter l’évaluation davantage sur les missions périphériques que sur la mission d’enseignement. Dans le second degré, la grille d’évaluation peut permettre aux chefs d’établissement d’interférer davantage qu’actuellement dans l’évaluation pédagogique, certains items pouvant donner lieu à un accroissement du néo ?management qui sévit déjà dans nos métiers. Les nouvelles modalités de l’évaluation professionnelle, la mise en place de l’accompagnement, devront, pour être efficientes, s’appuyer sur une offre de formation continue largement abondée et sur une relation de confiance entre les corps d’inspection et les enseignants. Une formation continue ambitieuse doit répondre aux attentes des collègues et non au seul besoin de l’institution et doit pouvoir rester le choix des personnels. Par ailleurs, la formation des chefs d’établissement et des IPR doit nécessairement évoluer pour répondre aux orientations portées sur l’accompagnement. Pour que cette réforme de l’évaluation soit acceptée par les personnels, il faut que notre administration prenne conscience de la nécessité de restaurer la relation de confiance qui devrait exister entre les personnels et les corps d’inspection et de chefs d’établissement, celle ?ci s’étant fortement détériorée ces derniers temps.
La FSU revendique la création d’une inspection spécifique pour les CPE et les professeursdocumentalistes. L’évaluation des personnels de cette discipline et de ce corps ne peut continuer à être confiée à des inspecteurs qui ne sont pas issus de leur métier et qui, trop souvent, font mine de ne pas en connaître les spécificités et les missions dans l’objectif de mettre au pas les personnels. Enfin, la FSU apprécie positivement la possibilité désormais offerte aux personnels de pouvoir exercer un recours sur l’évaluation finale en ayant connaissance de l’ensemble des éléments d’évaluation qui les concerne. C’est une avancée importante pour la transparence et l’équité de traitement des personnels. Toutefois, le processus qui est proposé est trop lourd et trop long et risque de décourager les personnels de faire appel voire de les faire se perdre dans les méandres des délais. La FSU a déposé un amendement pour tenter de résoudre cette difficulté. Pour conclure, de nombreux chantiers restent ouverts. Parmi les plus importants, il y a celui de la discussion sur les arrêtés définissant précisément les modalités de l’évaluation, y compris la construction des grilles pour les professeurs documentalistes et les CPE, la construction du guide de l’évaluation, de la notice d’appui et du document de référence. Il y a celui de la construction des barèmes nationaux d’accès aux différents grades qui doivent respecter les orientations déjà discutées d’accès de tous à la hors ?classe et de rotation dans l’accès à la classe exceptionnelle. Il faudra aussi rappeler aux services déconcentrés qu’ils doivent donner aux élus en CAP la capacité de mener à bien leur travail de défense des personnels, de garantie de l’équité de traitement et que cela passe en particulier par la communication aux élus des comptes rendus d’évaluation. La FSU sera vigilante à ce que les engagements pris lors des discussions sur les fiches se traduisent concrètement dans les textes d’application et que les commissaires paritaires disposent des moyens pour exercer leur mandat. Par ailleurs, la FSU demande que des bilans soient programmés dès la mise en place des nouvelles dispositions : effectivité du parcours en deux grades, garantie de l’égalité femmes/hommes.
Paris le 7 décembre 2016