Des enfants de sans-papiers dorment régulièrement dehors. Notamment des élèves de l’école Saint-Exupéry, à Lille, dont les enseignants se sont mobilisés après l’aggravation de la situation ce printemps. Leur appel commence, enfin, à être entendu.

PAR CHRISTIAN FURLING PHOTO CHRISTOPHE LEFEBVRE

Ce lundi 18 juin sera le jour d’un autre appel. À la solidarité, à donner, sans attendre, le minimum : un toit à des enfants et à leurs parents sans papiers, quitte à examiner ensuite leur situation administrative.

Ce lundi 18 juin, toutes les écoles primaires de Lille participeront à l’action lancée par des enseignants de Saint-Exupéry, révoltés par la découverte, une fois de trop, qu’une famille avait dormi à la belle étoile. Sinan et Hajrija, Bosniaques, et leurs trois enfants, âgés de 8 à 2 ans, avaient passé la nuit à même le sol, il y a quelques semaines. On leur a trouvé des tentes, puis un abri par le 115 (Samu social).

Mais le cas n’est ni réglé ni isolé. Souillés de terre après une nuit dans les buissons ou sous un porche, des élèves de maternelle doivent être lavés par l’équipe pédagogique. Il y a dix jours, Diana, 6 ans, et son père, venus de Palestine avec un titre de séjour, dormaient dans leur voiture.

Sergei et Natalia, réfugiés russes, se repliaient à l’hôpital Saint-Vincent. « Ils dormaient encore dehors avant-hier », glisse Marie Bernard, l’une des enseignantes de Saint-Exupéry qui ont porté la colère et repéré sept familles en situation critique. La fermeture de 85 places du 115, dans la métropole, depuis fin mars, font que des familles sans papiers et sans toit sont par moment à la rue.

Parce que ça dure depuis trop longtemps et pour aller plus loin que leur action au quotidien à l’école, tous les enseignants de Saint-Exupéry ont créé l’association « Sans toit à la belle étoile ». Une étoile symbole de souffrance et de combat pour forcer la fortune. Fait rare, elle réunira, lundi, toutes les écoles primaires de Lille. « C’est une très bonne surprise, se réjouit Marie Bernard, tout le monde participe, quel que soit le quartier. Plus quelques écoles maternelles, nous n’avons pu en appeler que certaines. Les élèves viendront avec une baguette étoilée et l’accrocheront à la grille de l’école ou sur une toile trouée. »

Baguette symbolique à défaut d’être magique, et que porteront évidemment les enfants de SaintExupéry. Ici, enseignants et élèves seront rejoints par les parents et d’autres habitants du quartier. Rassemblement à 8 h 30. Martine Aubry, maire de Lille, ira dans l’une des écoles.

Mais ces premiers succès vont au delà de la- mobilisation. Alors qu’elle avait vainement alerté la préfecture, une nouvelle lettre, déposée l’autre mercredi, après la médiatisation de la situation, a trouvé écho. Une délégation de Saint-Exupéry sera reçue à la préfecture lundi, à 17h. "C’est la première fois qu’ils veulent nous écouter", apprécie, sans s’enflammer, Marie Bernard.

"Les choses ont changé. Les gens nous croient beaucoup plus. Avant, ils pensaient "Elle doit baratiner". Ou ils refusaient d’y croire, parce que c’est trop horribe. Ici, chaque enfant ou presque a vécu des trucs horribles."