CAA de Lille, 12/01/2009
Nos propositions pour un lycée démocratique :
Une vraie réforme du lycée doit être guidée par le souci de la démocratisation et de l’amélioration des conditions de travail des personnels. Elle doit se faire en lien avec une réflexion sur les réformes nécessaires du collège et de l’Université.
1) Réduire les effectifs des classes.
2) Remettre les contenus au cœur de la réflexion.
Le lycée général et technologique doit être guidé, lui aussi, par les principes de la culture commune : le lycée forme le citoyen et prépare aux études supérieures ; le lycée technologique est fondé en outre sur le principe de la double finalité (formation citoyenne et professionnalisation). Des contenus solides de formation sont donc indispensables : on ne peut réfléchir sur une réforme du lycée sans commencer par s’interroger sur les missions de celui-ci, et en ne parlant que des structures.
3) Poser la question des horaires de façon plus pertinente, en prenant en compte la réalité du travail des élèves et la diversité des séries.
Le projet de réforme est inacceptable parce qu’il pose la réduction horaire comme un préalable. Réduire les horaires est une réponse démagogique alors qu’il faudrait repenser le temps de l’enseignement, varier les modalités du travail des élèves et leur donner les moyens effectifs d’un travail en autonomie.
4) Proposer des situations d’apprentissage diversifiées aux élèves d’une classe (dédoublements, séances en groupe de taille très réduite…) pour créer toutes les conditions de la réussite scolaire, mais aussi aider les lycéens dans leur apprentissage de l’autonomie.
5) S’attaquer réellement à la difficulté scolaire qui doit être traitée « dans le cours », et non pas à côté, mais il faut pour cela des conditions de travail améliorées. Des effectifs surchargés empêchent la diversification des pratiques pédagogiques, obligent souvent les enseignants à recourir au « cours magistral » et à une pédagogie implicite, souvent problématique pour les élèves en difficulté. La lutte contre l’échec scolaire demande des moyens à mettre en œuvre de la préscolarisation des deux ans à la 3e de collège, et c’est dans cette dynamique que doit s’inscrire la remédiation en lycée
6) Faire de la classe de 2de une véritable classe de détermination. Il faut à la fois du temps et des structures pour permettre aux enseignants de remédier aux difficultés des élèves, et une organisation qui permette aux élèves de préparer leur orientation ultérieure. L’articulation entre le tronc commun et les options, ainsi qu’entre les enseignements de 2de et ceux du cycle terminal, doit être repensée. Le maintien des options doit permettre aux élèves de découvrir des enseignements qui n’existent pas aux collèges, ou qui y sont enseignés de manière optionnelle. Il faut proposer à l’issue de la 2de des passerelles pour la série de leur choix, en assurant les conditions de leur réussite. A la logique ministérielle du module, le SNES oppose et défend celle de l’option.
7) Maintenir et diversifier les séries de l’enseignement général, qui sont efficaces si elles sont équilibrées (suffisamment larges, suffisamment typées). Elles permettent un équilibre entre la diversification (nécessaire pour diversifier les voies de réussite) et l’unification (nécessaire pour assurer l’égalité entre élèves). Nous refusons la hiérarchisation des séries et des voies, qui reproduit dans l’école des hiérarchies sociales injustes. Toutes les séries doivent être des voies de réussite, et il est absurde de hiérarchiser les contenus en fonction de leur prétendue « utilité ».
Il faut rénover la série L : elle apparaît trop souvent aux élèves comme étant « spécialisée par défaut ». Il faut à la fois en refaire une « série générale », (rétablir un enseignement solide de mathématiques), et lui donner une identité plus forte (place de la philosophie dès la classe de première ? renforcement des enseignements artistiques ?) et plus attractive. La « suprématie » de la série S n’est pas tant liée à son contenu qu’aux stratégies individuelles des familles. Il faut lutter par l’information contre ces pratiques (renforcées par la réforme Darcos). Ne doit elle pas être rééquilibrée pour répondre mieux à la diversité des disciplines enseignées ? Quant à la série ES, son équilibre, sa réussite et sa contribution à la démocratisation du baccalauréat sont reconnus par tous… pourquoi vouloir la faire disparaître ?
8) Renforcer les séries technologiques. Si les enseignements doivent permettre la poursuite d’études, et pas seulement vers le BTS, il faut maintenir à ces formations leur double finalité, qui permet des enseignements adaptés. La mise en cohérence des enseignements suppose une organisation qui ne peut se fondre dans l’organisation en « briques » et « modules » tels que ceux présentés par la réforme Darcos. Une véritable voie technologique demande des enseignements lourds et ne peut se résumer à un saupoudrage de modules technologiques. Le SNES demande le retrait de la réforme du bac pro en 3 ans, qui va se substituer au bac techno actuel ; alors que ces ces deux bacs ont leurs finalités propres.
9) Multiplier les passerelles entre les séries et voies de formation, pour éviter les sorties sans qualification ou les arrêts trop précoces des études. Ces passerelles doivent permettre à un élève de passer d’une série à l’autre en cours de formation. A la logique de Darcos consistant à accélérer les flux d’élèves, il faut réfléchir au doublement Si on ne peut les défendre par principe ils ne peuvent pas être rejetés catégoriquement, mais pourraient être évités plus souvent si les enseignants avaient le temps de s’occuper plus individuellement, dans leur cours, des élèves les plus en difficultés.
10) Renforcer le travail inter catégoriel et interdisciplinaire.
Pour le SNES, la classe de seconde doit devenir une classe de détermination ce qu’elle n’a jamais été, ouvrant sur le maintien de séries diversifiées, qui permettent à la fois l’acquisition d’une solide culture commune, réponde aux attentes des élèves et débouchent sur des perspectives de formation. La solution n’est pas dans l’atomisation des formations et l’individualisation des choix, mais dans une offre à la fois cohérente, claire et diversifiée. Le SNES refuse la semestrialisation et la modularisation des enseignements qui tendent à les dénaturer et qui s’inscrivent dans une logique de dérégulation de l’école et de casse des statuts des personnels. La question des passerelles est décisive car ce sont elles qui doivent donner la souplesse au système et rassurer des élèves peu désireux de figer rapidement leur choix d’orientation. Ce sera envisageable dans le cadre d’un travail approfondi mené en équipes au sein de la communauté éducative où la place des conseillers d’orientation psychologues doit être renforcée.
Ces quelques pistes, non exhaustives, montrent ce à quoi pourrait ressembler une réforme du lycée qui aurait vraiment à cœur de démocratiser l’école, de permettre à tous les élèves, quelle que soit leur origine sociale, de réussir à l’école. Il est urgent de mener le débat non seulement pour dénoncer la réforme Darcos qui n’est que reportée, mais aussi pour convaincre la profession, mais aussi et surtout les élèves et les parents de la pertinence de nos revendications. Une telle réforme doit aussi s’opérer dans le cadre d’une réflexion sur les missions du collège. C’est le sens que le SNES entend donner à la construction d’une culture commune. Avant toute signature d’un texte de réforme, que ce soit avant ou après le Congrès national, le SNES doit consulter l’ensemble des syndiqués, démarche fondamentale de fonctionnement démocratique.