N’hésitez pas à poser certaines de ces questions aux représentants du ministère qui viendront "encadrer" les réunions "PLE" dans votre établissement... et à utiliser les réponses proposées ici pour contrer leurs discours.
1 : cette procédure va-t-elle permettre d’harmoniser l’évaluation entre établissements ?
Non, absolument pas, puisque par définition chaque établissement définit un cadre d’évaluation qui lui est propre. C’est au contraire une incitation à la différenciation de l’évaluation d’un établissement à l’autre. Or justement, l’enjeu serait d’avoir des pratiques d’évaluation similaires d’un établissement à l’autre… ou plus précisément d’avoir une harmonisation autour d’une épreuve identique.
2 : cette procédure va-t-elle permettre d’harmoniser les pratiques d’évaluation au sein de chaque établissement ?
Même pas, sauf de manière formelle. Si tel enseignant a la réputation de noter de manière « sévère », et tel autre de noter de manière plus « laxiste », le fait qu’ils se mettent d’accord pour faire chacun 3 devoirs surveillés, 2 DM et 2 interrogations de cours par trimestre ne changera rien aux réputations et aux pratiques éventuellement différentes : les enseignants continueront, s’ils le font, à noter de manière différente, mais avec le même nombre de devoirs…
L’enjeu d’une harmonisation est bien de définir une pratique de notation commune, et cela suppose, dans le cadre des épreuves terminales, une procédure complexe d’harmonisation par de longs débats autour des attentes, des exigences, de ce qui est attendu ou pas dans la copie, etc. Faudra-t-il donc faire une commission d’harmonisation à chaque devoir ?
De plus, avec le contrôle continu, et la fin des épreuves terminales dans certaines disciplines, les collègues vont perdre une culture commune de l’évaluation et donc de ce qu’il faut enseigner, de comment le noter. C’est toute une socialisation qui ne va plus se faire, les manières d’enseigner risquent donc de devenir de plus en plus locales et donc inégalitaires.
3 : cette procédure va-t-elle rassurer les parents ?
Non, pour les raisons indiquées ci-dessus : cette procédure formelle ne changera rien aux réputations éventuelles de tel ou tel enseignant. On peut au contraire penser que, d’une part, cela va créer de la défiance chez les nombreux parents qui, jusqu’ici, ont confiance dans l’institution (on les incitera à se poser des questions que, jusqu’ici, ils ne se posaient pas, parce qu’elles n’avaient pas lieu d’être), et d’autre part cela va inciter les parents à contester toujours plus les évaluations des enseignants. C’est donc à coup sûr une source de conflits croissants avec les parents, et de défiance généralisée.
Et puis d’ailleurs, pourquoi faudrait-il "rassurer les parents", comme l’argumentent souvent les IPR qui animent les réunions ? Cette idée est, en soi, un bel aveu : apparemment, le contrôle continu au bac pourrait comporter des dangers, des risques, des sources d’inquiétude pour les parents... Vraiment ?!
4 : serons-nous contraints par ce nouveau cadre ?
Si nous acceptons de le construire, oui ! Mais les seuls contraintes seront celles que nous acceptons, non seulement de mettre en œuvre, mais de construire nous-mêmes.
En effet, cette procédure doit être « validée » par le Conseil pédagogique : mais cette instance n’a aucun pouvoir décisionnel, et ne peut rien nous imposer. Elle doit ensuite être « présentée » en CA, mais sans vote : en l’absence de vote du CA, il n’y a là non plus aucune obligation d’appliquer cette procédure.(sans vote). Tant qu’il n’est pas intégré au projet d’établissement, le PLE n’est pas contraignant formellement, rien ne nous oblige à le suivre (même s’il est « voté » en CA).
Mais si formellement, cette procédure ne nous engage à rien, dans les faits, si nous acceptons d’en jouer le jeu, si nous établissons des règles précises et détaillées, alors nous forgerons nous-mêmes les chaînes qui viendront entraver notre métier, car d’autres sauront s’en saisir (chefs d’établissement ou parents d’élèves tatillons…).
5 : comment faire pour écarter les risques ?
Au moment de la rédaction, mieux vaut rester dans les généralités, sans quantifier, en s’appuyant sur ce qui se fait déjà dans le lycée. Le projet d’évaluation doit être « synthétique et lisible ». Mieux vaut s’en tenir à un rappel de grands principes communs à toutes les disciplines qui laissera libres les collègues de faire les choix qu’ils jugeront pertinents avec leurs classes : « des devoirs communs pourront être organisés », « une évaluation globale ou sommative par période sera menée », etc… sans préciser les seuils ni les cadences.
Surtout, il faut refuser toute modification du Règlement intérieur et toute intégration au projet d’établissement. La DGESCO a d’ailleurs confirmé au Snes-FSU qu’il n’était pas prévu de mettre le PLE dans le Règlement Intérieur, ni dans le projet d’établissement.
Enfin, le rattrapage des évaluations et la prise en compte dans le contrôle continu des aménagements pour compenser le handicap poseront des problèmes d’organisation, compte tenu des réalités très contraintes de la « vraie vie » des établissements (emplois du temps, disponibilité des salles, mobilisation de la vie scolaire…). En aucun cas, cela ne doit induire de nouvelles charges sur les professeurs et la vie scolaire.
Et enfin, il faut rappeler haut et fort notre revendication d’une remise à plat des réformes Blanquer du lycée et du bac.
A consulter pour plus d’éléments, le guide syndical du PLE : https://www.snes.edu/article/controle-continu-projet-evaluation-guide-syndical/