Texte action / Congrès académique du 4 mars 2010
Poursuivant leur démarche d’instrumentalisation de la crise, à des fins de rentabilité et de recherche sans cesse accrue des profits, nombre de grandes entreprises privées continuent d’annoncer des plans sociaux ou des fermetures de sites industriels. Le congrès académique du SNES salue à cet égard la lutte des salariés du site Total de Dunkerque. L’Etat, relais efficace du patronat néolibéral, multiplie les menaces sur l’emploi et les services publics (la Poste, les suppressions de postes, le développement de l’autonomie et de l’autoritarisme dans l’Education nationale, ...), tout en poursuivant la casse des retraites et de la Sécurité sociale. Des luttes se développent à ce sujet, mais aussi sur les salaires et les pensions.
Dans le second degré, les perspectives sont inquiétantes :
alors que le manque de personnels est déjà flagrant, l’académie de Lille va accueillir 1321 élèves en plus à la rentrée 2010 et perdre 646 postes qui s’ajoutent aux 5000 suppressions depuis 2001 ;
l’offre de formation va aller en diminuant à cause de la mise en place de réformes contestées par la majorité des collègues (réforme des lycées, réforme des EPLE) ;
les futurs lauréats des concours vont subir également une réforme catastrophique qui va les mettre sur le terrain à temps plein, sans formation professionnelle, en annualisant à la fois leur stage et la période de formation sans que l’on sache qui assurera cette formation, ni où ;
la charge de travail des personnels va aller encore en s’aggravant : pression pour faire accepter des heures supplémentaires ou pour renoncer à un temps partiel, nombre de classes en charge en augmentation, service partagé sur plusieurs établissements, etc ....
Tout cela dans la plus totale des improvisations : préparation de rentrée dans les lycées avec volte-faces sur les enseignements d’exploration (sans dotation supplémentaire) qui empêchent tout travail sérieux ; début du mouvement intra sans que soient connues les modalités d’affectation des futurs stagiaires (qui pourraient bloquer le mouvement)
RGPP et réformes dangereuses pour l’Education nationale
La logique voudrait qu’une société du XXIe siècle fasse tout pour assurer l’avenir de ses enfants et qu’elle choisisse d’investir dans l’Education durable ; au lieu de cela, c’est la logique comptable qui prime, les discours sur la priorité nationale que doit être l’Education ne sont que du vent et notre gouvernement préfère donner plusieurs milliards en cadeaux fiscaux à quelques privilégiés et récupérer quelques millions au détriment des élèves du service public.
Nous avons fait les comptes : appliquer des effectifs de 24 élèves en collège et 20 en RRS, limiter à 30 élèves la taille des classes en lycée, requiert environ 1 300 postes dont nos élèves auraient besoin dans le 2d degré dans l’académie, soit 38 millions ... une paille comparée aux 13 milliards annuels de la loi TEPA.
Supprimer des postes n’est justifié qu’en raison de la volonté idéologique gouvernementale de ne pas remplacer un départ en retraite de fonctionnaire sur deux dans le cadre de la RGPP qui conduit à terme à la casse du statut de la Fonction publique ; comme les dizaines de milliers de suppressions qui ont déjà eu lieu compromettent le fonctionnement des établissements scolaires, les ministres Darcos et Chatel ont mis en place une réforme des lycées qui va permettre à nouveau de substantielles économies à court terme, mais avec quels dégâts sur le long terme ! En effet, la réforme des lycées qui nous est imposée diminue les horaires disciplinaires, au détriment des élèves les plus fragiles qui ne peuvent pas bénéficier d’une aide chez eux. Cette diminution est la suite logique de la mise en place du socle commun et des horaires planchers en collège qui aboutissent à ce qu’un élève qui arrive en 2de ait l’équivalent d’un an de cours en moins en maths et en français qu’un collégien d’il y a 20 ans. Ce n’est pas le niveau qui baisse, ce sont les horaires !
La RGPP conduit en plus et en même temps à la paupérisation des EPLE par le désengagement croissant de l’Etat (crédits d’enseignement en berne, dotations pour les manuels scolaires laminées …) et le report de cette charge financière sur les collectivités territoriales et sur les familles, ce qui ne peut qu’aggraver les inégalités sociales.
Les dangers de la réforme des lycées ne résident pas que dans les suppressions de postes : la réforme Chatel introduit également en seconde de nouveaux enseignements dont le contenu disciplinaire est volontairement gommé (outil pour la polyvalence) et dont certains relèvent du saupoudrage culturel (un enseignement scientifique d’1 h 30 assuré par 3 professeurs de 3 disciplines différentes, 30 mn chacun, tout en affaiblissant de véritables disciplines), de nouveaux programmes sont rédigés à la hâte, sans que l’on sache ce qui est prévu pour le cycle terminal et pour le bac, avec des tentatives d’annualisation des services et d’introduction de la polyvalence. Certains nouveaux programmes dénaturent la discipline elle-même.
Elle remet en cause des séries qui fonctionnaient, malgré les affirmations du recteur, comme les ST2S ou les STI dont les horaires fondent comme neige au soleil. Le rectorat favorise l’ouverture d’enseignements d’exploration dans le privé et supprime ou limite le nombre de possibilités dans le public.
La réforme des lycées introduit enfin une concurrence entre disciplines puisqu’il faudra choisir celles qui auront droit à un horaire dédoublé, ces choix pouvant être différents d’un établissement à l’autre : que va devenir l’Education nationale, les programmes et les examens nationaux si chaque lycée fait ce qu’il veut ?
Le développement de l’autonomie dans les établissements, source supplémentaire d’autoritarisme
La section académique doit intervenir assez fréquemment pour relayer des demandes d’audience d’établissements en butte aux pratiques autoritaires de leurs chefs d’établissement, quand il ne s’agit pas de militants syndicaux. Certains sont soumis à un harcèlement de leur hiérarchie, ce qui est inacceptable.
Le vote du décret sur les EPLE va accentuer le nombre de ces situations et déjà, la préparation de la rentrée 2010 quelques jours après la publication des décrets, est symptomatiques des dérives prévisibles : des collèges ont eu à subir des vexations par la reconvocation des CA pendant les vacances ou encore par l’absence de TRMD à voter, le chef d’établissement expliquant qu’il ne présentera que le résultat, sans que les élus aient les moyens de vérifier ou de présenter une contre proposition comme les textes encore en vigueur leur permettent.
Partout, les tensions montent
Les conseils d’administration et les conseils pédagogiques se déroulent actuellement dans un climat houleux, les grèves locales et les votes contre se multiplient. Le malaise des personnels s’amplifie en salle des profs :
– aux conditions de travail difficiles, on ajoute le choix entre la peste et le choléra (autrement dit de choisir entre la suppression de leur poste ou son maintien, mais à condition d’enseigner dans un enseignement d’exploration ne correspondant pas à leur qualification ; choisir entre un complément de service ou la participation à des dispositifs d’aide ou d’excellence ou encore des heures en SEGPA … Autant de façons d’imposer les réformes)
– nombre de collègues comprennent qu’il s’agit de détruire la référence de principe à une Education nationale comportant des programmes et des diplômes nationaux, avec des disciplines et des métiers identifiés, avec des statuts nationaux garantissant la laïcité, tout cela au profit d’un modèle entrepreneurial mettant les établissements au service du patronat.
– les personnels ont à faire à un rectorat qui leur donne l’impression qu’il ne reconnaît pas à sa juste valeur le travail qu’ils effectuent chaque jour ; et ce sentiment ne pourra être qu’accentué si le projet de note de service mutations valorisant l’affectation hors discipline illégale est maintenu, d’autant que le commentaire associé à ces 300 ou 950 points, indique qu’il est « normal » de renforcer la bonification de ces vœux. Il s’agit là d’un camouflet pour les enseignants et CPE que nous sommes et une remise en cause des compétences professionnelles dument validées jusque là par une formation et un concours exigeants.
– Les collègues subissent de plus en plus la mise en concurrence entre établissements. Ils souffrent aussi d’une baisse du pouvoir d’achat dû au blocage des salaires.
– Les CIO sont de plus en plus menacés. Le manque de recrutement des COPSYS aboutit à un alourdissement des tâches de travail des personnels et à un recours massif à l’auxilariat. Le transfert des tâches sur les enseignants constitue une grave menace pour la survie de la catégorie et pour une efficace prise en compte des besoins des élèves au niveau de l’orientation
Agir dès maintenant
Dans l’immédiat, il invite les personnels à lancer dans les établissements une campagne de refus des heures supplémentaires et à mettre en échec les conseils pédagogiques et à développer des modalités d’action fortes (refus collectif des tâches non statutaires, boycott d’examens blancs, rétention de notes, actions en concertation avec les parents, du type « établissement mort » partout où c’est possible.
Le congrès dénonce les conditions scandaleuses de l’accueil et de la formation, annoncées pour la rentrée 2010, des professeurs stagiaires dans les établissements. Désorganisant les services, menaçant de bloquer le mouvement des mutations, plaçant les stagiaires dans une situation professionnelle intenable et inadmissible, elle affectera la scolarité de nombreux élèves. Il appelle les personnels à refuser collectivement et individuellement les stages en responsabilité pour les PLC1 et à être tuteur d’un lauréat de concours affecté à temps plein. Nous devons faire comprendre que les métiers d’enseignants et de CPE s’apprennent et exiger le retour à un véritable stage de formation alternant théorie et pratique, dans le cadre d’un stage correspondant à 1/3 d’un temps plein.
Des actions de grève ont démarré dans les collèges et les lycées, suite à l’annonce des suppressions de postes, conséquences de la volonté injustifiable de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux et de la mise en place de réformes contestées par la majorité des personnels.
Le congrès académique du SNES apporte son total soutien aux mobilisations et mouvements en cours dans l’académie.
Il rappelle que des préavis de grève ont été déposés pour l’ensemble du mois de mars afin de couvrir toutes les initiatives locales qu’elle appelle à poursuivre et amplifier. C’est le cas notamment (liste non exhaustive) à Denain, à Boulogne, à Châtelet Douai et Fénelon Lille, 2 établissements qui reconduisent dès lundi 8 mars
La réussite massive de la grève du 12 mars doit permettre de poser nos revendications sur le retrait de la réforme, les salaires et pensions, l’avenir du service public. Cette action peut être un moment fédérateur alors que les actions se multiplient dans les établissements. Elle permettra l’instauration d’un rapport de forces favorable, si elle s’inscrit dans un calendrier d’actions déterminées et rapprochées. L’action du 23 mars offre une perspective à saisir.
Le congrès invite les personnels à se réunir ensuite pour mettre en débat la reconduction du mouvement, par des actions de grèves, y compris pendant les périodes des examens (Bac, brevet, BTS, CAP ...). D’ores et déjà, la grève du mardi 23 mars offre la perspective d’une poursuite d’action rapide et d’une convergence des luttes public privé plus que nécessaire avec la bataille à mener sur l’emploi et les retraites.
Le congrès appelle à chercher partout les convergences de luttes entre les services publics, tous visés par les politiques néolibérales du pouvoir et de l’UE, ainsi que des convergences avec les salariés de l’industrie, dont l’emploi est massivement cassé en France et dans la région. De même le congrès affirme sa solidarité avec tous les salariés des pays de l’UE soumis à d’intenses politiques de casse sociale et qui résistent au diktat des gouvernements nationaux, du patronat et de l’UE.
51 Pour, 3 abstentions, 0 contre, 0 refus de vote