9 septembre 2019

Le Snes-FSU dans l’Académie

Texte action voté par la CAA de la section académique du SNES-FSU le 9 septembre 2019

Situation générale

L’exécutif veut faire de cette période de rentrée un tremplin pour relancer son agenda de contre-réformes économiques et sociales, conforme aux attentes des institutions européennes. Fragilisé par le mouvement des Gilets Jaunes et conscient de l’impopularité persistante que suscite son action, il distribue les éléments de langage destinés à accréditer l’idée que la méthode gouvernementale aurait changé et se fonderait désormais sur l’écoute, le dialogue et la restauration de la confiance. Loin d’être un changement de politique, ce changement de ton traduit une évolution tactique dont l’objectif est de neutraliser les oppositions potentielles : il s’agit toujours de faire baisser la dépense publique afin de financer les réductions d’impôt pour les plus riches tout en réduisant le déficit public. À titre d’exemple, le plan massif de suppressions de postes au ministère des Finances Publiques va dans ce sens. Simplement, l’heure n’est plus à la stratégie du tapis de bombes, mais au déminage tous azimuts et à la prudence. La prise en compte des questions sociétales (PMA, grenelle des violences conjugales), à titre d’exemple, n’est pas totalement désintéressée et vise aussi à atténuer l’image réactionnaire qui colle aux réformes engagées contre l’intérêt des classes populaires. Pourtant, dans plusieurs secteurs des mobilisations sont en cours : la colère dans les services d’urgences ne faiblit pas, tout comme la mobilisation chez les pompiers ou dans les Finances Publiques. Ces différents pôles de contestation témoignent d’une contestation qui perdure dans les services publics et sont autant de points d’appui à prendre en compte dans les mobilisations à venir.
En outre, la période du bac a été secouée par une mobilisation inédite et déterminée de certains enseignants : grève des surveillances, retenue des copies et refus de siéger en jury, poussant le ministre Blanquer à provoquer des irrégularités, voire des falsifications des résultats du bac. Cela doit nous amener à réfléchir sur les différentes formes d’action (grève reconductible, caisse de grève, etc.) dans les mobilisations à venir, qui doivent rendre possible la construction d’un « tous ensemble et en même temps ».

Fonction publique

La Loi « pour la transformation de la fonction publique » a été promulguée cet été, après de nombreuses actions qui n’ont pas permis de mobiliser largement. Pour autant, sa mise en œuvre progressive -dans l’attente de la publication de nombreux textes réglementaires – doit être l’occasion pour le SNES et la FSU de continuer à en dénoncer les méfaits, mais aussi de réduire la portée des mesures adoptées : il s’agit notamment de contraindre l’administration à un maximum de transparence sur les actes de gestion, en dépit de la suppression de nombreuses compétences des CAP. En outre, les attaques contre le droit de grève dans la Fonction Publique Territoriale montrent bien que le gouvernement a la volonté de mettre au pas et de museler la Fonction Publique. Le décret sur les formations forcées et rémunérées pendant les vacances va dans ce sens. Ces attaques pourraient très rapidement nous concerner, par exemple au travers du devoir d’exemplarité de la Loi Ecole de la Confiance.

Retraites
La façon dont est abordée la réforme des retraites est emblématique de la stratégie gouvernementale : tenir un discours social (une réforme « juste et équitable ») pour défendre un projet régressif pour tous, dont l’objectif est de plafonner le montant global des pensions à 14% du PIB alors que la population vieillit. Cela ne peut que dégrader les pensions, y compris par ce que la « valeur du point » serait une variable d’ajustement aux mains des futurs gouvernements.
Le SNES-FSU est opposé au projet de réforme systémique de retraite par points, synonyme d’individualisation et de baisse drastique des pensions, en particulier pour les personnels de l’Éducation Nationale. Il initiera et conduira avec la FSU, avec le souci de la convergence des luttes, les mobilisations les plus unitaires possibles pour le retrait de ces projets de réformes, la défense d’un système solidaire avec un retour aux 37.5 annuités pour tous, et une retraite à taux plein à 60 ans sur la base de 75% du dernier indice brut.

Éducation
Lycée, une rentrée qui ne trompe personne
La mise en pratique de la réforme du lycée suscite dès maintenant un grand mécontentement :
  Sentiment d’insatisfaction constant lié à la mise en pratique de programmes souvent infaisables qui enlèvent du sens au métier et qui fragilise les professeurs.
  Vigilance sur la mise en place, sur le terrain, des procédures d’évaluation au local. Il va falloir résister et pointer au fur-et-à-mesure les dangers.
  Résistance face à la volonté de court-circuiter totalement les PsyEN en faisant reposer encore davantage le travail d’orientation sur les personnels enseignants.
La consigne a sans doute été donnée par le ministère et le rectorat de faire la rentrée à tout prix, quels que soient les problèmes d’emploi du temps. Mais, au-delà de la communication officielle, les réformes passent mal l’épreuve de la réalité ; voici quelques exemples :
-le seul vœu autorisé dans la fiche dédiée n’a pas toujours été respecté
-les élèves sont parfois censés être à deux cours en même temps
-en première, il peut y avoir jusqu’à 48 profs intervenant dans une même classe....et ce n’est pas exceptionnel.
-Le groupe classe a disparu en première, ce qui rend le travail des PP e des CPE impossible. Comment communiquer réellement, et non, virtuellement avec une équipe de 48 collègues ? Comment les conseils de classe vont-ils pouvoir se dérouler ? Ce n’est pas par hasard que c’est en première qu’il manque le plus de PP.
Beaucoup de collègues font état de leur anxiété pour cette nouvelle année, tant à cause du nombre d’élèves à prendre en charge (HSA) qu’à cause des nouveaux programmes et du manque d’informations.

Collège : dégradation continue.

Si l’offensive majeure pour inscrire "l’École du Socle" dans le marbre de la Loi Blanquer a échoué, le ministère entend bien continuer à attaquer l’unité du second degré (statut, spécialisation disciplinaire, liberté pédagogique), par la labellisation (les cités éducatives) et dans le cadre plus général des logiques néo-managériales engagées depuis plusieurs années, mais qui s’intensifient depuis la réforme du collège. Plusieurs rapports publiés récemment l’y encouragent, et des expérimentations sont envisagées. C’est dans ce contexte que le Snes doit faire un état des lieux des modalités d’évaluation des élèves, de plus en plus souvent pilotées par la hiérarchie afin de les faire converger vers des dispositifs transversaux (dits « par compétences ») compatibles avec ceux du premier degré.
Dans les établissements, la mise en place des Pial menace les conditions de travail des AESH et fragmente l’accompagnement. Nos collègues relèvent l’écart de plus en plus important entre le discours ministériel sur « le service public de l’inclusion », et la réalité des classes, où ils/elles se sentent démunis, non-formés et sont souvent confrontés à une inclusion imposée qui multiplie en outre le nombre de personnels dans les salles. Les PIAL mutualisent les AESH au sein de plusieurs écoles ou de plusieurs collèges. Les emplois du temps des AESH seront « flexibles » et surtout les AESH corvéables à merci, puisque leurs horaires et lieux d’intervention pourront changer au gré des demandes et surtout de l’absence de moyens. Où est donc l’intérêt des élèves à besoins éducatifs particuliers qui bénéficieront de manière ponctuelle de la présence d’un.e AESH pour réussir leur scolarité ?
Dans l’éducation prioritaire, l’inquiétude grandit à la veille de la remise du rapport Mathiot-Azéma qui envisagerait de confier aux académies la labellisation des réseaux REP au nom du dogme de la territorialisation des politiques éducatives, alors que celle des REP+ resterait nationale. L’allocation progressive des moyens qui s’annonce ne peut, dans le cadre budgétaire actuel, que déboucher sur la suppression des moyens spécifiques accordés aux territoires les plus défavorisés.
Le rapport Charvet de juin 2019 propose la « transformation des CDI en Bibliolabs, espace commune de travail des PsyEN, des professeurs, et qui pourraient intégrer des antennes des CIO », au mépris des missions des professeurs-documentalistes et aux dépens des PsyEN. Le Snes-FSU doit s’opposer à ce projet qui sonne comme une provocation pour les professeurs-documentalistes, alors que le CAPES de documentation fête ses 30 ans cette année.
La rentrée est aussi marquée par une offensive réactionnaire : les drapeaux et la Marseillaise en classe, ainsi que le SNU visent à encadrer militairement la jeunesse. Les moyens alloués à ces dispositifs auraient pu servir à renforcer les missions d’éducation de l’Education Nationale au quotidien.

Actions
Le Snes et la FSU portent une responsabilité particulière dans la lutte qui va s’engager contre la mise en place du système de retraites dit "universel", d’abord parce que les personnels qu’ils représentent en seraient les premières victimes, mais aussi parce que c’est notamment dans l’éducation que la conflictualité offre le plus de perspectives de mobilisation compte-tenu des nombreux motifs de mécontentement (mise en cause de l’identité professionnelle, hausse des effectifs, réformes du lycée et du bac, déclassement salarial, etc.).
La lutte, pour avoir des chances d’aboutir, doit tenir compte des écueils posés par le calendrier gouvernemental, conçu pour "jouer la montre" afin d’épuiser les opposants, et de la "méthode" qui consiste à lancer un grand débat destiné à marginaliser les organisations syndicales comme la nôtre dans le but de les présenter comme uniquement contestataires et corporatistes. Il nous faudra également répondre à une communication rassurante en total décalage avec la réalité du projet.

La CAA considère ainsi :

 que le préalable à une mobilisation réussie est l’information des personnels situés dans notre périmètre de syndicalisation : heures syndicales, stages, conseils syndicaux dans toute l’académie, production d’outils (flyées, vidéos, etc.) sur la face cachée du discours de Blanquer, sur la réalité des métiers et du quotidien des élèves. Cette mobilisation doit permettre de déboucher rapidement sur une action de grève, et de pointer l’ensemble des attaques sur le métier et les conditions de travail, sans oublier la question salariale et les conséquences concrètes de la mise en place de la retraite par point.
La question des retraites ne doit pas être séparée de la question salariale que le gouvernement cherche à éluder, ou qu’il pourrait instrumentaliser pour imposer une "transformation" de nos métiers mettant en cause nos statuts et développant le mérite sous tutelle managériale.

 que dans l’attente de la présentation finale du projet de réforme, le Snes et la FSU doivent soutenir les initiatives qui recherchent l’unité et la convergence dans le cadre des intersyndicales nationales Fonction Publique (la question des retraites est liée à celle de statuts) et Interprofessionnelle (le choix du système de retraites est un choix sociétal lourd).

Mais c’est dès maintenant qu’il faut doter les personnels des outils permettant, le moment venu, d’engager une mobilisation par la grève susceptible d’emmener l’ensemble de la profession dans un mouvement qui devra s’inscrire dans la durée : outils numériques comme des listes de diffusion, les réseaux sociaux, caisse de grève nécessaire à la perspective de reconduction de la grève.

Voté à l’unanimité des 42 présent.es