18 janvier 2012

Le Snes-FSU dans l’Académie

CTA 17 janvier 2012 - déclaration préalable

Déclaration FSU

En 2008, les accords de Bercy ont instauré la « rénovation du dialogue social » dont François Fillon et Eric Woerth définissaient à l’époque les grands principes :

 Conforter la légitimité des organisations syndicales de fonctionnaires

 Promouvoir la place de la négociation dans la fonction publique

 Renforcer le rôle et améliorer le fonctionnement des organismes consultatifs

 Conforter et améliorer les droits et moyens des organisations syndicales

En 2012 dans l’académie de Lille, vous prenez le contrepied total de ces dispositions, et ce, dès la mise en place du premier CTA.

Ainsi, l’installation très tardive de cette instance par rapport aux autres académies, mais aussi, les documents préparatoires qui ont été envoyés moins de 4 jours avant la tenue du CTA, voire pas du tout pour les Segpa pourtant à l’ordre du jour, rendant caduques de fait le décret sur les CT et le projet de règlement intérieur.

Cela traduit un mépris manifeste pour notre travail de représentants des personnels : estimez vous vraiment que nous ne préparons rien en nous laissant si peu de temps pour produire nos analyses ? Ou est-ce votre interprétation très personnelle de « l’amélioration du fonctionnement des organismes consultatifs » ? Dans le même ordre d’idée, vous avez décidé de maintenir le calendrier des GT barèmes alors que l’intersyndicale vous a demandé un report de quelques jours et continue à vous le demander, faute de quoi l’ensemble du calendrier emploi et carrières sera compromis.

Par ailleurs, vous avez mis à l’ordre du jour un projet de règlement intérieur aux antipodes de toute prétention affichée de "rénovation du dialogue social" et contraire même à la lettre du décret de février 2011. Nous vous demandons donc de prendre en compte les amendements que nous allons être amenés à discuter dans quelques minutes.

Ces dysfonctionnements ne sont que la partie émergée de l’iceberg, l’Education nationale est devenue un vaste champ d’expérimentation de toutes les dérives libérales et en premier lieu de la RGPP avec 1020 nouvelles suppressions dans l’académie de Lille, portant le total à près de 8 000 depuis la fin des années 90. Cette année encore moins que les autres, les suppressions ne se justifient au regard de la démographie, puisque d’un côté, dans le premier degré, vous supprimez un poste de professeur des écoles pour 15 élèves en moins (sachant que vos effectifs d’élèves sont tronqués et qu’une baisse démographique artificielle est organisée en ce qui concerne la maternelle), que vous créez un poste en collège par tranche de 30 élèves supplémentaires, et que vous supprimez un poste en LEGT par tranche de 18 élèves EN PLUS ! Quant aux 468 suppressions de postes en LP, elles sont le résultat du développement de l’apprentissage et de la mise en place du bac pro en 3 ans, dont on mesure maintenant les effets mécaniques. Mais les suppressions de postes ne sont-elles pas le moteur de toutes les réformes qui nous sont imposées depuis 2007 ?

Le président de la République », le jeudi 5 janvier 2012, lors d’une étape à Chasseneuil-du-Poitou parmi ses nombreux voeux a utilisé les termes « Excellence », « Justice » et « Unité » pour parler du service public d’Education. Voilà donc comment vous le traduisez dans l’académie de Lille : dans le premier degré, ce sont 399 postes qui disparaissent. Un comble quand l’OCDE constate la faiblesse du taux d’encadrement du premier degré. Nous savons que ce sont les postes RASED, de remplaçants, de conseillers pédagogiques et d’intervenants de langues qui seront les premiers touchés, sans oublier la disparition de la scolarisation des « tout petits » y compris en zone d’éducation prioritaire. L’école maternelle soit disant renforcée par la parution de programmes spécifiques, et la nomination d’IEN départementaux, reste dans le viseur des réductions de moyens. La baisse régulière du taux de scolarisation des enfants dès deux ans en est le cruel constat. La FSU demande que la scolarisation des enfants dès deux ans soit possible partout sur le territoire dès lors que les parents en font la demande.
Où est la justice quand le rapport PISA pointe du doigt l’aggravation de l’impact des différences sociales sur les résultats scolaires ? Pour mémoire, la France consacre à l’école primaire 15 % de moins que la moyenne des pays de l’OCDE. La suppression des postes RASED ne va qu’accentuer ce phénomène. Où est la justice quand le droit à la scolarisation est bafoué ? Quand la continuité du service public n’est plus assurée faute de remplaçants ? Des familles se sont entendues dire que l’enseignante absente pour une durée de 7 semaines ne serait pas remplacée mais que cela n’était pas grave puisque l’école n’est pas obligatoire avant 6 ans ! Dans les collèges et lycées, de petites annonces commencent à apparaître pour dénicher quelqu’un susceptible d’effectuer un remplacement en anglais, en maths … y compris à Lille même. Où est la justice, où est l’équité quand la scolarisation en segpa est dans le collimateur ? Ce n’est pas par une pseudo-intégration en classe ordinaire que l’on aidera les élèves en difficulté grave et persistante. Où est l’excellence quand on supprime des postes d’intervenants langues et la possibilité pour des collégiens et lycéens de choisir une LV2 ou même une LV1, alors que l’enseignement des langues est une des priorités affichées dans l’académie ? Où est la justice quand les mots « éducation prioritaire » ont disparu des textes ministériels ? La relance des ZEP n’a jamais vu le jour. Pire, des réseaux où les postes surnuméraires, et le travail d’équipe avaient permis une dynamique pédagogique ont été abandonnés. Et ce n’est pas l’acronyme ECLAIR qui va changer quoi que ce soit : l’échec de ce dispositif a été tel que le ministère est en train de publier dans l’urgence et la précipitation une circulaire pour essayer de pourvoir des centaines de postes à l’échelle nationale restés vacants faute de volontaires pour y aller. Espère t-il ainsi récupérer des déçus du mouvement inter qui pourraient rentrer dans l’académie de leur choix par ce moyen détourné ? Un tel type de recrutement fondé sur l’opportunisme serait une véritable catastrophe. La FSU condamne le nouveau projet de circulaire ECLAIR, comme elle condamne le recrutement des personnels par le chef d’établissement.

Parmi les autres dérives auxquelles nous sommes confrontés, la volonté accrue d’autonomie des établissements et de décentralisation, qui nous a valu un énième projet non concerté sur l’évaluation par les chefs d’établissement, projet lui aussi rejeté par les personnels qui revendiquent un double regard sur l’exercice de leur métier, et un regard qui ne se limite pas à des objectifs chiffrés selon les lubies du moment, sans prise en compte de leurs qualités professionnelles dans l’exercice quotidien de leurs métiers, sans prise en compte des aspirations de nos élèves.

Au niveau académique, la nouvelle gouvernance trouve un écho avec le décret « relatif à l’organisation académique » publié au JO du 6 janvier dernier et qui réorganise en profondeur l’architecture de notre système éducatif. Pour la FSU, il s’agit d’un renforcement du pilotage académique au détriment de l’échelon départemental qui conduira à une accélération de la disparition de certains services départementaux avec de nombreuses conséquences en termes de suppressions d’emplois administratifs et/ou d’obligation de mobilité. Pour les usagers, comme pour les personnels qui relèvent d’une gestion par les services départementaux de l’Education nationale, cela se traduira par plus d’éloignement et par une dégradation de la qualité du service public rendu aux usagers. Ce sont des questions lourdes pour l’avenir du système éducatif qui méritent un débat démocratique beaucoup plus approfondi. C’est pourquoi la FSU demande le retrait de ce texte et exige qu’une large concertation s’engage avec l’ensemble des acteurs concernés : usagers, élus, personnels.

Nous nous opposons aussi à la mise en place de la labellisation du "service public d’orientation" (SPO) qui sert de prétexte au rectorat pour attaquer les missions des COPSY et détruire le réseau des CIO (entraînant suppressions, fusions, précarité des personnels).

Nous nous opposons également aux fusions d’établissements décidées d’en haut, sans prendre en compte les élèves, ni les personnels, laissant les rumeurs créer des malentendus, alimenter des discordes, comme c’est le cas à Van Der Meersch Roubaix ou à Carnot Gambetta à Arras.

Pour terminer, nous rappellerons l’urgence de la revalorisation de nos métiers, tant du point de vue des conditions de travail, d’entrée dans le métier que du salaire, les premiers résultats aux concours de recrutement montrent que nous entrons dans une crise de désaffection sans précédents (92 admissibles au CAPES de lettres classiques pour 170 postes). Or, le ministre de l’Education refuse pour l’heure de revenir sur la mise à temps plein des stagiaires. De même, il n’a annoncé en novembre que des « mesurettes » de revalorisation salariale uniquement pour les enseignants en début de carrière (augmentation d’environ 100€ par mois et de 50% de l’indemnité des directeurs et directrices d’école, ces augmentations revenant à écraser la grille indiciaire, les nouveaux recrutés bac + 5 intégrant la grille actuelle à compter du 6e échelon).
Même s’il n’en a pas pris la réelle dimension, le ministre lui-même reconnaît que la question salariale est un sujet crucial pour les personnels, dont les rémunérations ont connu une très forte baisse depuis le début des années 80 et restent très éloignées des salaires de leurs collègues européens. Il y a donc urgence à ouvrir de réelles négociations salariales pour rendre nos métiers attractifs et pour compenser la perte de pouvoir d’achat. Pour la FSU la revalorisation salariale de tous les fonctionnaires ne peut se faire qu’à travers une revalorisation du point d’indice.

C’est pour toutes ces raisons qu’elle appelle à soutenir l’action des directeurs d’école pour réclamer la prise en compte de l’alourdissement de leur charge et la création de postes de secrétaires administratifs. Dorénavant, c’est « Je réponds quand j’ai le temps » : les directeurs d’école ne se consacreront qu’aux activités pédagogiques en lien avec les élèves et au travail relationnel indispensable auprès des familles. Le reste attendra : Enquêtes multiples, listings à fournir, demandes administratives, ne seront pas prioritaires.

C’est également pour toutes ces raisons que la FSU appelle à la réussite de la grève du 31 janvier.

Enfin, nous ne saurions finir cette déclaration préalable sans témoigner de notre soutien aux équipes éducative, pédagogique et d’encadrement du collège Jean Jaurès de Lens, injustement mises en cause depuis la rentrée à travers les médias. La politique de réduction des moyens, en particulier en vie scolaire, montre là toutes ses limites : les moyennes et des résultats aux examens sont une chose, le suivi individuel et la prise en compte de l’humain en sont une autre, la réalité nous le rappelle cruellement ces derniers temps.