Ce CDEN a pour objet la dernière préparation de rentrée d’un quinquennat qui s’était donné pour ambition de refonder le système éducatif public. Une ambition qui avait incité la FSU à investir un dialogue social remis au goût du jour après des années de mépris pour les personnels et leurs représentants. Que reste-t-il aujourd’hui de cette ambition éducative ? Que reste-t-il de la volonté initiale de dialogue avec les personnels et leur représentation syndicale ? L’institution, à tous ses niveaux, minimise trop souvent l’expertise des représentants des personnels. Nos instances académiques en sont le reflet lorsque les débats ne débouchent sur rien d’autre que sur une volonté d’imposer des choix prédéfinis par un système de plus en plus éloigné des réalités du terrain. Les questions posées lors de ces instances reçoivent des réponses qui sont trop souvent des fin de non recevoir ou des non réponses, les compte-rendus ne sont plus fidèles aux débats. Les instances locales dans les EPLE ne se portent pas mieux lorsque les choix faits pour la prochaine rentrée sont exclusivement ceux des chefs d’établissements ou quand ces derniers ne respectent pas les délais ou textes réglementaires qui doivent s’appliquer.
Ainsi, l’espoir ressenti par les enseignants en 2012 pour leur métier et leurs conditions de travail a peu à peu disparu pour laisser place à un mal-être profond. Depuis trois ans, la FSU n’a pas cessé d’avertir et de pointer les difficultés grandissantes que connaît l’Éducation Nationale. La hausse des démissions de stagiaires et de titulaires est symptomatique d’un malaise général qui est en train de s’installer. Continuer de ne pas le reconnaître serait faire preuve d’un aveuglement préoccupant et même dangereux.
Au collège, c’est un dialogue de sourds qui s’est installé depuis 2 ans. Les professeurs, toujours majoritairement opposés à une réforme qui a amputé les horaires disciplinaires et l’offre de formation, sont confrontés à une pression écrasante liée à la mise en place de la réforme et à la charge de travail que représentent les nouveaux programmes sur les quatre niveaux. A cela s’ajoutent des pressions locales pour contraindre les enseignants à abandonner les notes chiffrées sous couvert du Livret Scolaire Unique, ce que pourtant le socle commun de connaissances, de compétences et de culture n’impose pas. La FSU demande qu’il soit rappelé aux chefs d’établissement que le livret personnel de compétences a bel et bien été abrogé, et que le choix du mode d’évaluation des acquis du nouveau socle relève statutairement des seules missions des enseignants.
Pour ce qui est de la préparation de rentrée 2017 dans les collèges, la situation n’est pas satisfaisante. La DEPP prévoit une hausse de 19 500 élèves en 6e à la rentrée 2017 et une augmentation de 0,9% des effectifs dans les collèges. Pourtant, la dotation 2017 des collèges du département est calculée pour des effectifs quasi stables (+46 élèves). La minoration des effectifs et les effets de seuil limitent les ouvertures de divisions pourtant nécessaires à la baisse des effectifs dans les classes. Il n’est pas acceptable d’avoir des classes qui atteignent 30 élèves ou plus lorsqu’elles accueillent des élèves en inclusion. Cela ne peut être compatible avec une réelle ambition éducative pour tous. Autre problème : le quasi statu quo de la carte des langues et la suppression maintenue de plus de la moitié des sections bilangues du département qui continue d’affaiblir l’offre linguistique dans les collèges publics.
Enfin, alors que la réforme du collège prévoit une augmentation de sa marge à la rentrée 2017, celle-ci n’est quasiment pas visible dans les dotations. Pour la FSU, cette marge reste un levier qui permettra de réduire les moyens. En effet, rien dans la réforme ne permet de la pérenniser ce qu’un prochain gouvernement pourrait très vite utiliser pour supprimer de nombreux postes. Ceci ne manquerait pas de nuire une nouvelle fois à la qualité du service public d’enseignement. Ce dernier a pourtant perdu 9900 élèves dans les collèges à la rentrée 2016, au niveau national, alors que le privé en a gagné 6400. C’est en 6e que la part de scolarisation dans le privé est la plus importante. Cela représentait bien une de nos craintes l’année dernière lorsque nous dénoncions la réforme du collège, et c’est bien la mixité sociale dans les collèges publics qui en est affaiblie.
En ce qui concerne les SEGPA, nous réclamons une augmentation et une sanctuarisation des moyens au moins à la hauteur de ce qu’ils étaient à la rentrée 2015. Si les nouveaux textes permettent de développer l’inclusion, ils rappellent clairement que la SEGPA reste une structure à 4 niveaux. Il n’y a donc pas lieu d’imposer d’inclusions généralisées qui tendraient à supprimer la 6e SEGPA. Nous vous demandons de garantir le maintien des structures SEGPA et de ne pas renvoyer au local, sous couvert d’autonomie, le devenir d’élèves en très grande difficulté.
Pour ce qui concerne le premier degré, rappelons également qu’en France, la dépense par élève dans le primaire est inférieure de 15% par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE et de 30% par rapport à la moyenne de 11 pays économiquement comparables au nôtre. Notre école primaire se singularise par un nombre d’élèves par classe largement au-dessus de la moyenne des pays européens, notamment en maternelle.
La dotation pour notre département s’élève cette année à 185 postes. Vos choix, Monsieur le Directeur Académique consistent à étendre le dispositif « Plus de Maîtres que de classes » à toutes les écoles élémentaires en éducation prioritaire, à renforcer la formation continue des PE, à favoriser la scolarisation des enfants de moins de 3 ans et à conforter le remplacement. Ces priorités nous les partageons. Toutefois, le dispositif « Plus de Maîtres que de classes », pour qu’il soit pleinement efficace, demande des temps de concertation hebdomadaire bien supérieurs à l’enveloppe qui nous est aujourd’hui dévolue. La scolarisation précoce, le travail en équipe et l’augmentation du taux d’encadrement des élèves sont pour nous des leviers de réduction des inégalités scolaires.
L’attention particulière que vous portez à l’éducation prioritaire est justifiée. C’est, en effet, une question de justice sociale et nous saluons votre volonté de faire le choix délibéré du qualitatif tout en évitant le saupoudrage. Alors que près d’un élève sur cinq est scolarisé en éducation prioritaire, c’est particulièrement dans ces territoires que sont corrélées les difficultés sociales et scolaires. C’est pour cette raison que nous partageons les fondements de l’éducation prioritaire : « donner plus et mieux à ceux qui ont moins », pour un système plus équitable. C’est tout le sens de l’appel du SNUipp-FSU pour l’Education Prioritaire signé par de nombreuses personnalités du monde de l’Education.
Nous affirmons aujourd’hui que pour répondre aux enjeux de justice sociale, pour faire progresser et réussir tous les élèves sur la base de contenus d’apprentissages ambitieux, il est indispensable de renforcer les politiques d’éducation prioritaire.
Les écoles qui bénéficieront d’un moyen supplémentaire verront leurs conditions d’enseignement évoluer significativement ce qui aura des conséquences positives sur la scolarisation des élèves.
Gouverner, c’est choisir et vous avez dû choisir entre des dispositifs innovants, la formation continue et les ouvertures de classes dans les écoles. Ce qui confirme que la dotation est insuffisante pour pouvoir activer tous les leviers susceptibles d’assurer la réussite de tous nos élèves. Dans de nombreuses classes, cette année encore, les effectifs seront trop chargés, surtout en maternelle où l’on est bien loin de la bienveillance affichée par la loi de refondation. Ce sont 60 écoles du département qui auront une moyenne de plus de 28 élèves par classe. Est-ce raisonnable ? Les RASED et les maîtres G sont une fois de plus les parents pauvres de l’Ecole alors que la prise en charge des élèves en grande difficulté nécessiterait l’intervention d’enseignants spécialisés pour éviter que certains restent sur le bord du chemin. De plus en plus les élèves relevant des dispositifs ULIS sont inclus dans les classes ordinaires ce qui n’est pas sans conséquence sur les effectifs de ces classes. La FSU a déjà exprimé son souhait que ces élèves soient comptabilisés deux fois dans les effectifs des écoles à la fois en ULIS mais aussi dans les classes ordinaires.
Le SNUipp-FSU Nord estime malgré tout notre dotation insuffisante. Il avait en effet estimé en 2014, les besoins de notre département à plus de 2 000 postes supplémentaires si on généralisait le dispositif « Plus de maîtres que de classes » à toutes les écoles, si on limitait les classes de TPS à 15 élèves, si on limitait à 22 élèves les classes en éducation prioritaire, si on abondait les postes d’enseignants spécialisés en RASED …
Toute seule, l’Ecole ne résoudra pas tous les problèmes. L’investissement dans l’Ecole et notamment en Education Prioritaire doit aussi s’accompagner de politiques de lutte contre les inégalités sociales, culturelles, économiques et d’une réelle politique de mixité sociale.
Pour autant, l’école peut déjà beaucoup. C’est ce qui fonde notre volonté commune d’œuvrer pour que notre école se transforme afin de permettre réellement la réussite de tous les élèves.
Investir pour l’Ecole, c’est investir pour l’avenir.